Salaün ar foll
- À Brizeux
- le Chant du pilhaouer
- les Feux de la Saint-Jean
- le Combat des Trente
- Avant et après les noces
- À elle
- Vechoëvus, légende de Cornouaille
- la Chanson du blé noir
- le Hollaïka
- le Soir
- la Chanson de l’abeille
- Magdalena
- Grallon le Grand et Corentin le Petit
- les Pilleuses de mer
- le Mal du pays
- Tristesse douce
- l’Angélus aux champs
- Ouessant
- l’Homme de fer
- Saint Sesny
- les Fleurs virginales
- Tom
- Soir d’automne en Kerne
- Lez-Breizh
- le Lierre
- Chœur des croisés
- Salaün ar foll
- Immortalité
- le Vieux chouan
- la Chanson de la mariée
- la Nuit des morts
- Souvenirs de régiment
- le Kreisker
- le Coutelas
- Danses après la moisson
- la Croix de fleurs
- Le Mang
- Chœur des vagues
- Crépuscule
- Marie
- les Petits cailloux
- Au duc Jean
- À la bonne duchesse
- Soir d’été
- Monastères et châteaux
- Marguerite
- Madenus
- les Feux de Saint-Pierre
- les Mobiles d’Arvor
- Mélancolie
- Sous la Terreur
- Salut à la mer
- la Grande cheminée
- les Pierres de Carnac
- la Procession
- Sehnsucht allemande
- les Vaches
- le Vieux château
- la Fête des âmes
- la Weladenn
- le Loup d’Hervé
- le Charivari
- Contraste
- la Moisson de Dieu
- Clair de Lune
- Sainte Anne d’Auray
- les Lucioles
- Submersion d’Is
- Avant et après Jésus
- le Jardin des Morts
- Encore une Sehnsucht
- le Vaisseau et le phare
- Soleil couchant
- le Commencement et la fin
- les Korrigans
- la Chanson des Grillons
- Dogme
- Épilogue
LÉGENDE DU PAYS DE LÉON
On vit un beau lis blanc croître et fleurir sur sa sépulture.
Fréminville
O itron Gwerc’hez Vari !
O ! Dame Vierge Marie !
Prière de Salaun
Perché sur un vieil arbre auprès de Guicquelleau,
Le pauvre Salaün chantait au bord de l’eau.
S’il descendait parfois de sa branche de chêne,
C’était pour aller boire à la source prochaine
Ou demander l’aumône aux gens de Lesneven,
Qui ne le laissaient pas s’agenouiller en vain.
Puis il s’en retournait à sa branche chérie,
En répétant toujours le doux nom de Marie.
Or il advint qu’un jour son chant pieux cessa
Et, les yeux vers le ciel, Salaün trépassa.
Un prêtre vint alors et fit porter en terre
Le corps inanimé du pauvre solitaire.
Bientôt un lis fleurit sur son humble tombeau.
On n’en avait pas vu jusque-là d’aussi beau.
Deux mots, en lettres d’or, sur la fleur symbolique
Avaient été gravés d’une main angélique.
C’étaient les deux premiers de l’Ave Maria.
Tant que vécut le lis, le miracle brilla.
Mais lorsque s’envola sa corolle effeuillée
Sous son pied desséché la terre fut fouillée.
Pour trouver la racine, il fallut, dans le sol,
Pénétrer jusqu’au corps de Salaun-ar-Foll.
Et lorsqu’avec grand’peine elle fut découverte,
On vit qu’elle sortait de sa bouche entr’ ouverte.
Quand la nouvelle en vint au duc Jean de Montfort :
« Vierge ! s’écria-t-il, rendez-moi saint et fort ;
« Vierge, vous savez-bien qu’il me faudra combattre
« Charles de Blois, rival bien digne de Jean Quatre,
« Or je vous fais un vœu dans le fond de mon coeur,
« Pourvu que du combat je revienne vainqueur.
« Je vous ferai bâtir une sainte chapelle,
« Les Bretons n’en auront jamais vu de plus belle.
« Elle s’élèvera près du tombeau fleuri
« De Salaün-ar-Foll, votre humble favori.
« Des feuillages légers aux colonnes de pierre
« S’attacheront, ainsi qu’aux vieux arbres, le lierre.
« La croix de Jésus-Christ dominera ses tours,
« De riches ornements suivront tous ses contours.
« Les pèlerins aux jours de vos fêtes bénies
« Viendront y dire en chœur vos saintes litanies ;
« Sous la voûte profonde un jubé merveilleux,
« Dentelle de granit, captivera leurs yeux. »
Ainsi parlait Jean Quatre ; il savait que Marie
Ne repousse jamais une âme qui la prie.
Une grande bataille advint, et l’on put voir
Comment les fils d’Arvor comprenaient leur devoir.
Chaque bras fit son œuvre, et toutes les épées
Du sang d’un ennemi s’en revinrent trempées.
Dans le combat d’Auray, si fécond en exploits,
Jean Quatre de Montfort vainquit Charles de Blois.
A peine de retour, il songea dans son âme
Qu’un serment l’engageait auprès de Notre-Dame.
Il remplit sa promesse en serviteur loyal ;
Marie, au Folgoat, eut un temple royal.
Et depuis cinq cents ans, sous ses arceaux gothiques
On n’a jamais cessé de chanter des cantiques.